Comment l’herbe pousse dans la prairie

Habitat

Une prairie est un écosystème complexe composée d’un sol, de plantes (flore) et de petits animaux (faune). Ce système en équilibre est bien sûr perturbé par l’arrivée d’équidés dont l’activité essentielle est d’ingérer les végétaux en grande quantité, plus de 25 kilos d’herbe par jour pour l’âne et plus de 50 kilos d’herbe par jour pour le cheval ! Pour bien gérer une pâture, il est donc préférable d’avoir quelques connaissances sur ces végétaux.

Dans un esprit de simplification, on peut dire que la flore d’une prairie est composée de graminées, vulgairement appelées herbes, de légumineuses et d’autres plantes neutres ou indésirables. Dans le cas des équidés, l’essentiel de l’apport alimentaire est fait par l’herbe : ray-gras, pâturin, fétuque, brome, flouve, etc. Toutes ces graminées ont un mode de croissance sensiblement identique.

La repousse

La repousse se fait à partir de ce qu’il reste de la plante après pâturage ou fauchage, ou à la sortie d’un stade végétatif saisonnier. Grâce aux réserves contenues pour une proportion majeure dans la partie basse de la tige, le plant émet une première feuille, courte et fine, qui lui permet de reprendre la photosynthèse. Puis poussent une seconde feuille, plus grande et plus large, et une troisième encore plus importante. Lors de la croissance de la quatrième feuille, la première meurt. À partir de ce stade, il n’y aura plus d’augmentation de la surface foliaire : l’apparition d’une nouvelle feuille est concomitante à la mort d’une autre, et alors que la tige fait son apparition, on observe une sénescence progressive des feuilles commençant par leurs extrémités. La tige s’étend vers le haut avec à terme formation d’un épi, floraison et développement de graines. Après l’épiaison, la plante retrouve un stade végétatif.

La repousse n’est donc pas un phénomène de durée illimitée. Elle ne se produit qu’en dehors des périodes végétatives, et surtout pour les graminées, au printemps, entre le moment du démarrage de la végétation et jusqu’à l’épiaison, puis lors de la repousse d’automne. Le temps écoulé entre la sortie de la phase végétative et l’épiaison n’est pas identique chez toutes les espèces. Par exemple, il est très court pour le ray-grass italien, mais beaucoup plus long pour le ray-grass anglais tardif ! La quantité de matière alimentaire obtenue pour un plant n’est pas non plus infinie, puisque après la pousse de la quatrième feuille, il n’y a plus de gain de quantité de feuille.

Indice foliaire

L’indice foliaire est une variable qui permet d’estimer la quantité d’herbe apportée à l’animal par mètre carré de pâture. Plus cet indice est élevé, plus la prairie est riche. L’indice foliaire est dépendant bien sûr du nombre de feuilles par plant et de leur taille. Il s’élève tout au long de la repousse et plafonne après la croissance de la quatrième feuille. Puisqu’il n’est pas possible d’augmenter le nombre et la taille des feuilles de chaque plant, la seule façon d’augmenter cet indice est d’avoir un plus grand nombre de plants au mètre carré. Ceci est obtenu par un semis serré, mais aussi et surtout par tallage.

Trois phases sont observables :

  • La phase 1 ou phase de démarrage : la prairie revient à cette phase après chaque pâturage. Elle correspond à la période pendant laquelle ce qui reste de la plante va mobiliser son énergie pour fabriquer la première feuille. Durant cette période, la pâture n’est pas utilisable, puisqu’elle ne peut apporter de matière alimentaire. La durée de la phase de démarrage est allongée après surpâturage car dans ce cas, les tiges ont été coupées à ras du sol et une grande partie des réserves énergétiques a disparu. Au contraire, cette phase sera plus courte si l’herbe a été peu mangée.
  • La phase 2 ou phase de pousse : les feuilles apparaissent progressivement, et l’indice foliaire est en constante progression. Une mise en pâture trop précoce arrête cette augmentation et ramène trop rapidement la pâture en phase 1.
  • La phase 3 ou phase de plafonnement : la dégénérescence des feuilles déjà poussées annule l’apport des nouvelles pousses. L’indice foliaire de la prairie est à son maximum, elle peut être utilisée. Dans des conditions climatiques optimums et sur un sol convenablement riche, l’ensemble de la phase 1 et 2 dure entre 20 et 30 jours.
La repousse : à partir des réserves contenues dans la tige, des feuilles sont émises successivement. À partir de la quatrième, la feuille la plus ancienne régresse et il y a plus alors de croissance utile d'un point de vue alimentaire
La repousse : à partir des réserves contenues dans la tige, des feuilles sont émises successivement. À partir de la quatrième, la feuille la plus ancienne régresse et il y a plus alors de croissance utile d’un point de vue alimentaire
Progression de l'indice foliaire lors de la repousse
Progression de l’indice foliaire lors de la repousse

Conclusions pratiques

La mise à l’herbe doit se faire après l’apparition de la quatrième feuille, et avant l’épiaison, au moment où la prairie présente le meilleur apport alimentaire.

Un repos d’au moins 20 jours doit être respecté entre chaque phase de pâturage, pour laisser le temps à la phase de démarrage et à la phase de pousse de se dérouler correctement.

Le pâturage ne doit pas se faire jusqu’à épuisement de la prairie, de manière à respecter les réserves énergétiques disposées dans la tige de chaque plant.

Les zones très abîmées doivent disposer d’un temps de repos bien plus long. Par exemple, il est possible de les protéger par une clôture électrique.

Une rotation rapide permet de raccourcir la phase de démarrage. Ne pas hésiter à faire des petites parcelles dans les prairies en déplaçant souvent les animaux.

Des surfaces trop grandes sont mal pâturées, avec des zones d’hyper fréquentation et d’importantes aires de refus. Cela génère une perte de surface majeure jusqu’à 30% du pré.

Lors d’ensemencement ou de réensemencement, préférer des graminées ayant une épiaison la plus tardive possible après le départ de la végétation. Les stars sont le ray-grass anglais tardif et la fétuque élevée, la palme revenant à la fétuque élevée méditerranéenne.

Cependant, ce n’est pas le seul critère de choix d’une graminée. Il faut également que celle-ci soit adaptée aux conditions climatiques de votre région : par exemple, le ray-grass anglais tardif ne pousse plus au-dessus d’une température de 25° C !

Pour une exploitation optimale de la praire, il faut aussi tenir compte des saisons et de l’apport que peut faire l’éleveur à ce système prairial par la fertilisation.

Le tallage permet, à partir d'un seul plant de graminée, d'en obtenir plusieurs
Le tallage permet, à partir d’un seul plant de graminée, d’en obtenir plusieurs. Lorsqu’un plant est en contact du sol après couchage, de nouvelles racines se développent et des plants poussent tout au long de la tige. Cela permet d’augmenter la densité de la prairie, et donc son indice foliaire. Le tallage est favorisé par le piétinement, mais aussi par le roulage après semis
Métabolisme des plantes légumineuses
Métabolisme des plantes légumineuses

Et les légumineuses dans tout ça ?

Si les graminées sont la composante la plus importante de la flore prairiale pour le cheval, les légumineuses ne sont pas pour autant négligeables. Il s’agit des trèfles, luzernes, lotiers, vesces, sainfoins…

En tant qu’apport alimentaire, leur incidence est moyenne. Certes, elles sont riches en protides, mais les besoins en ces éléments sont bien moins importants chez les équidés que chez les vaches laitières. D’ailleurs, les ânes et chevaux en consomment peu, préférant les graminées, ce qui n’est pas plus mal : un apport excédentaire en protéines est préjudiciable à l’animal. De plus, certaines légumineuses ne sont pas dénuées de toxicité. Il est habituel de considérer qu’un pâturage destiné à l’alimentation des ânes et des chevaux ne doit pas comporter plus de 25% de légumineuses. Attention, cela ne signifie pas qu’il faille, lors de semis, mettre en terre 25% de graines de légumineuses. En effet, par leur performance en croissance et en colonisation d’une part, et par leur sous-consommation par les équidés d’autre part, les légumineuses représenteraient rapidement plus de 50% de la flore du pré ! En fait, par ensemencement naturel, l’équilibre graminées/légumineuses se crée spontanément. Il vaut mieux donc ne semer que des graminées.

L’importance des légumineuses réside surtout dans leur capacité de fixer l’azote atmosphérique par le biais des bactéries symbioses qu’elles abritent dans leur système racinaire. Cela permet un apport en engrais naturel, qui sera exploité par les graminées.

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